Van Eeghen Group

VAN EEGHEN GROUP

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Pays-Bas

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Internet : www.vaneeghen.com

Van Eeghen Group aujourd’hui :

Portrait d’une maison de commerce unique en son genre

L’histoire est un carnet de bord et non pas une boussole

Le siège  de la maison Van Eeghen à Amsterdam

Tout au long de ses plus de trois siècles et demi d’existence, la direction de l’entreprise Van Eeghen s’est efforcée de garder le cap sans regarder derrière sur son passé, déjà d’une grande richesse. Plutôt que de se reposer sur les lauriers gagnés par ses ancêtres, chacune des générations suivantes a su garder les yeux fixés sur l’avenir qui se profilait à l’horizon. Le fait d’être implantée depuis des lustres ne garantit pas à une entreprise un avenir radieux. Cela ne fonctionne que si la direction s’attache à tirer les leçons du passé. Comme pour tout navigateur, la lecture des livres de bord est d’un précieux recours pour établir l’itinéraire de la traversée. Mais pour tracer sa course, il a besoin de la boussole que constitue son sens aigu des affaires.

Compléments nutritifs et pour sportifs

Préparations parapharmaceutiques pour nourrissons

Tandis que les Compagnies des Indes orientales et occidentales allaient et venaient, tout comme les gouvernements d’ailleurs, de même que les maisons de commerce qui se créaient, fusionnaient, avant de couler, l’entreprise Van Eeghen, elle, a toujours su garder son indépendance pour survivre, et est toujours là, plus active que jamais. La réussite de l’entreprise Van Eeghen à travers ces longs siècles qu’elle a su traverser est due en partie à la persistance avec laquelle cette maison de commerce pas comme les autres s’est attachée, depuis 1662, à maintenir les trois piliers sur lesquels elle repose :

  • le strict respect de l’intégrité et de la qualité de ses prestations dans ses relations ininterrompues avec ses partenaires;
  • une souplesse dans son organisation et ses activités pour faire face, s’adapter et anticiper les changements que connaissent les marchés, tout en restant dans son cœur de métier, qui est la vente de marchandises ;
  • la persévérance et la ténacité.

La maison Van Eeghen -1990 à Aujourd'hui

La maison Van Eeghen: désormais les ingrédients nutritifs fonctionnels
Pendant la deuxième moitié des années 1990, la société Van Eeghen s’est lancée sur le nouveau marché des aliments fonctionnels, et a entrepris d’investir également dans le marché en pleine éclosion des produits ayant un effet bénéfique sur la santé, un nouveau segment de marché qui, en l’espèce a vu le jour au Japon et aux États-Unis. La maison Van Eeghen n’a pas douté un instant, qu’à terme, ce marché pendrait son essor en Europe. Elle se fondait sur la conviction qu’un nouveau marché était sur le point de se développer eu égard aux tendances marquantes qui se dessinaient et qui se caractérisaient par :

  • une démographie qui connaît des mutations et une population qui ne cesse de vieillir ;
  • une nouveauté dans les comportements qui consiste à considérer qu’il vaut mieux prévenir que guérir ;
  • une incitation à rester en bonne santé résultant de la privatisation des assurances maladie ;
  • des progrès accomplis dans les connaissances du consommateur et sa prise de conscience de l’importance de se préoccuper de sa santé;
  • l’apparition des compléments alimentaires pour contrecarrer l’idée répandue selon laquelle on a un mauvais régime alimentaire ;
  • des attentes accrues quant à la personnalisation des produits alimentaires bénéfiques pour la santé ;

Aujourd’hui, les ingrédients fonctionnels commercialisés par la maison Van Eeghen constituent une gamme complète de produits, parmi lesquels l’on compte la Choline, l’inositol, la taurine, les nucléotides, les vitamines, les sels minéraux, des pré-mélanges, des dérivés de vitamines, les antioxydants, les acides aminés, des extraits naturels de plantes et des huiles nutritionnelles. Ces ingrédients sont destinés aux secteurs que sont la nutrition parapharmaceutique pour nourrissons et les compléments alimentaires et autres suppléments destinés aux sportifs. Dans le même temps, notre maison est devenue le partenaire incontournable de quelques-unes des plus grandes multinationales fabriquant des produits alimentaires pour enfants, ainsi que certains des plus grands producteurs de pré-mélanges au monde. Elle s’est également assurée une place de tout premier rang dans l’industrie des compléments alimentaires et autres suppléments destinés aux sportifs, en renforçant sa connaissance des produits, son réseau et ses savoir-faire dans le domaine des préparations pour nourrissons.

À gauche, l’ancien CEO van Eeghen et à droite, l’actuel CEO Jeroen van Eeghen

Préparations parapharmaceutiques pour nourrissons Compléments nutritifs et pour sportifs

La maison Van Eeghen est synonyme de produits de qualité supérieure, de prestations de tout premier rang, de contrôles de qualité approfondis, d’une tarification contractuelle fixée sur le long terme, de livraisons sur le principe du «  juste-à-temps » (JAT) et de partenariats de longue date. Nos produits de marque et sans marque sont soumis aux tests de qualité les plus rigoureux, afin de garantir que les ingrédients entrant dans nos préparations parapharmaceutiques pour nourrissons offrent les meilleurs gages de sélection et de sécurité. Nous sommes les leaders du marché en ce qui concerne un grand nombre de vitamines et de leurs dérivés, en particulier pour les vitamines E, B et C, mais aussi pour les antioxydants, les acides aminés et extraits naturels de plantes.

Ainsi, le pôle d’ingrédients alimentaires fonctionnels de la maison Van Eeghen présage du commencement d’un tout nouveau cycle dans le développement de créneaux de spécialisation.

Pour de plus amples informations sur ce domaine d’activités, nous nous renvoyons au site internet de la maison Van Eeghen : www.vaneeghen.com.

L’histoire récente de la maison Van Eeghen : 1930 - 1990

Après 1945, l’Indonésie acquit rapidement son indépendance suite à un méchant épisode dû au fait que la Hollande se cantonnait dans ses positions colonialistes. Les plans en cas d'imprévus de la société Van Eeghen étaient déjà auparavant axés sur une diversification de ses activités en direction d’autres pays d’Extrême Orient et d’Afrique, en transportant des produits semblables à ceux venant d’Indonésie. Une succursale pour les importations et les exportations vit le jour à Dar-es-Salam, en Tanganyika (la Tanzanie actuelle). Des produits industriels, tels que des matériaux de construction, ceux destinés au chemin de fer, engrais, matériel électrique et produits alimentaires étaient achetés pour les marchés d'Afrique de l’Est, tandis qu’étaient exportés des matières premières pour l'industrie alimentaire, du sisal et du mica. Ces activités commerciales ont par la suite été cédées à une entreprise commune fondée avec la participation du gouvernement tanzanien (la société State Trading Co.), qui contrôlait une grande partie de l’import-export du pays.
Alors que cette entreprise fut rachetée en 1968 par l’état tanzanien, la société Van Eeghen & Co installa à Amsterdam une succursale, ou bureau chargé des achats, Intrata Overseas BV. Le projet gigantesque, cofinancé par la Corporation Financière Internationale (CFI) de la Banque Mondiale et d’autres, était de réunir tous les fonds nécessaires à la création de la plantation de canne à sucre et de l’usine de transformation de Kilombero en Tanzanie. Cette entreprise est encore en fonctionnement aujourd’hui.

À cette époque, une nouvelle loi interdisant à une société de travailler à la fois dans le négoce et la finance, avait contraint la maison Van Eeghen à revendre sa succursale bancaire. Bien que tous les liens aient rompus, la banque spécialisée dans les titres de participation privés subsiste encore de nos jours sous le nom d’Oyens & Van Eeghen.

À la fin des années 50, la maison Van Eeghen & Co s’aperçut du potentiel que représentaient les cuisines orientale et exotique, ainsi que du goût prononcé de la société d’abondance moderne de plus en riche pour les plats déjà cuisinés. Notre maison devint l’un des plus grands fournisseurs de légumes déshydratés aux entreprises de transformation de produits alimentaires aux Pays-Bas et à l’étranger, grâce à la création d’une nouvelle filiale, Van Eeghen International BV. Cette activité devait évoluer pour devenir le socle principal de la maison, en positionnant le pôle chimie sur la vente et la distribution dans le domaine de la chimie fine.

Familière du troc et des petits accords entre amis dans les pays du C.O.M.E.C.O.N. (d'après les initiales anglaises, ou C.A.E.M. pour « Conseil d’Assistance Économique Mutuelle ») et du Tiers Monde, la société Van Eeghen International apportait une valeur ajoutée significative aux yeux de ses clients qui aimaient les risques non prévisibles qu’engendrait un tel négoce. La maison Van Eeghen, grâce à son nez creux face aux changements politiques, comme par exemple dans les pays du Pacte de Varsovie, qui s’était avérés être de bons payeurs dans les beaux jours du Communisme, fut bien inspirée de demander des garanties en cas de défaut de paiement des livraisons, deux ans seulement avant la chute du mur de Berlin.

Les deux filiales de Van Eeghen qui se trouvaient au cœur de la direction des activités de la société mère de 1960 à 1985 étaient les sociétés Central Buyers BV à Amsterdam, et Central Procurement Ltd. à Winchester, au Royaume-Uni. Toutes deux travaillaient dans le monde entier comme agences d'approvisionnement et de conseil à l’international, représentant des organisations gouvernementales du Tiers-Monde pour des projets de développement cofinancés par diverses sources dans l'agriculture, la sylviculture, l'élevage et la pêche, l'irrigation, l'éducation, l'alimentation en eau et électricité, ainsi que l'exploitation minière. 80% des projets étaient financés par la Banque mondiale. Les projets présélectionnés pouvaient obtenir des facilités de crédit proposées par la maison Van Eeghen, et grâce auxquelles ils se trouvaient dans la même situation que s’ils avaient disposé d’un compte courant, ce qui leur évitait ainsi de subir la lourdeur des procédures d'ouverture et de confirmation des lettres de crédit.

Les réseaux des deux sociétés, leur pouvoir d’achat, les infrastructures de transport, tant pour les importations que pour les exportations, ainsi que leurs contrats d’assurance se sont avérés d’un grand secours pour les « exportateurs non-initiés », là où la coopération internationale était défaillante. La solide implantation commerciale de l’entreprise fonctionnait à merveille pour eux, afin de concrétiser leur mot d’ordre qui était de « passer de la pauvreté à l’abondance ». Quand, toutefois, la synergie avec le reste de l’entreprise se mit à se déliter et que les perspectives de valeur ajoutée commencèrent à se dissiper, il a été jugé sage de se débarrasser de ces deux domaines d’activités.

Et pourtant, l’abandon de cette pratique à la Van Eeghen consistant à participer au développement et à la coopération n’a en rien été un frein à la poursuite du commerce avec les pays en voie de développement. Le réseau établi par la maison Van Eeghen et sa connaissance intime des cultures non-européennes, de même que la persévérance de la direction, qui n’a rien d’occidentale, et sa vision à long terme, ont permis d’aboutir à des partenariats commerciaux dans le « tiers », le « second »  et le « premier » mondes.

Se gaussant des courants de pensée traditionnels, la fiabilité et l’efficacité sans faille dont la maison Van Eeghen a su faire preuve à travers une histoire marquée par des transformations spectaculaires ont en fait une entreprise foncièrement ancrée dans son époque, qui comprend peu de niveaux hiérarchiques, qui respecte scrupuleusement l'éthique commerciale et apporte une grande valeur ajoutée à ses clients. Au cours du siècle dernier, la souplesse des Van Eeghen leur a permis de passer d’une maison de commerce implantée sur le marché des produits de première nécessité a une entreprise commerciale axée sur des segments de marché spécialisés.

Les marchés d’Extrême-Orient : 1820 - 1950

En 1824 la « Nederlandsche Handel-Maatschappij » (appelée plus tard la N.H.M., ou la Compagnie de commerce néerlandaise) a été fondée pour faire reprendre les relations commerciales entre la Hollande et l’Orient, et surtout en se servant de navires hollandais. L’Indonésie devient à proprement parler une colonie des Pays-Bas et à partir de 1829 fut instauré le ‘Cultuur Stelsel’, un genre de système de production, aux fins d’encourager les autochtones à cultiver et de produire des denrées industrielles destinées à l’exportation, ce qui devint plus ou moins le monopole de la N.H.M..
L’entreprise Van Eeghen & Co, dirigée entre 1839 et 1847 par Pieter II, avec l’aide de son fils Pieter Christiaan et de son neveu Jan III, se rendit compte qu’elle avait besoin des exportations de textiles vers l’Orient pour s’assurer des expéditions suffisamment volumineuses. C’est ainsi qu’ils furent les premiers à financer la « ceinture de coton » de la Twenthe, région de la partie orientale des Pays-Bas. En 1860, Jan van Eeghen investit à grands frais dans les premiers métiers à tisser non manuels. La maison Van Eeghen travailla en étroite collaboration avec les fabricants de textile G. & H. Salomonson, pour esquiver le monopole de la NHM sur les exportations de coton.

En 1842, Van Eeghen & Co expédia par l’intermédiaire de B. Kopersmit & Co à Batavia (qui deviendra l’actuelle “Jakarta”) sa première cargaison de feuilles de cuivre et de clous, qui étaient très prisés dans ce port à l’activité intense. Pour rentrer à Amsterdam, dans le bateau se trouvaient des tonnes de riz de l’île de Java. Le commerce avec l’Indonésie s’intensifia quand la N.H.M. se mit à assouplir ses mesures protectionnistes. Pain Stricker & Co devient un associé de confiance à Batavia, employant à partir de 1858 un ancien stagiaire de la maison Van Eeghen & Co., B. Heldring. Il ne cessait d’envoyer des rapports très enthousiastes sur les opportunités de développer le commerce du coton et les systèmes monétaires sur l’archipel indonésien. En 1875, le réseau de la société Van Eeghen était composé de 30 maisons de commerce. Les exportations de coton vers l’Indonésie, avec pour le retour des cargaisons de produits agricoles, assuraient dès lors la prospérité de l’entreprise, lesquelles dépassaient dès 1865 le chiffre d’affaire réalisé avec les États-Unis. Après 1900, les expéditions de peaux séchées et de tabac n’ont pas cessé d’augmenter.
Dans les années 1890, des liens plus étroits furent tissés avec 23 plantations à but lucratif, produisant principalement du café, du thé, du latex, de la quinine, du cacao, des épices et de l’huile de palme et permirent à l’entreprise d’assurer le commerce de ces produits. Le tabac de Sumatra connut un parcours assez cahoteux, mais la production de latex décolla après 1909, après que Van Eeghen & Co. apporta son concours pour installer la « Nederlandsche Rubber Maatschappij » (Compagnie néerlandaise du latex) et la Tjiboeni Tjipongpok Caoutchouc Company. Le commerce du coprah se développa rapidement, en particulier grâce aux bonnes relations entretenues avec la maison Michael Stephen & Co. à Macassar.
Christiaen Pieter van Eeghen (dirigeant de l’entreprise de 1865 à 1889) mit en place un système de télécommunications avec Batavia, installa une machine à écrire (l’une des premières aux Pays-Bas) et une liaison téléphonique grâce à cette invention brevetée par Bell, faisant ainsi de la maison Van Eeghen l’un des bureaux le plus modernes de la ville. L’augmentation des investissements étrangers, des droits de douane à l'importation différentiels et de nouvelles dessertes maritimes contribuèrent à transformer davantage encore le monde du commerce. Les produits indonésiens étaient directement expédiés par navire vers, par exemple, l’Amérique du Nord, la Grande-Bretagne et l’Inde, plutôt que de les diriger sur Amsterdam où des maisons de commission installées depuis longtemps par des négociants répartissaient les marchandises en fonction la demande sur les marchés internationaux. Les derniers vestiges du marché des aliments de base d’Amsterdam succombèrent à ce que l’on pourrait qualifier de «  groupage du commerce transfrontalier », dont les Van Eeghen ont été les précurseurs. Bien avant 1785, la maison faisait déjà commerce des céréales de la Baltique au poids, alors même qu’elles étaient expédiées directement de Prusse vers l’Italie. Les Van Eeghen se s’ont efforcés d’apporter de la valeur ajoutée en procédant au raffinage des produits et en stockant les marchandises rares avant de les livrer, ce qui est devenu et demeure aujourd’hui encore, dans une large mesure, le cœur du métier de la maison.
La création de marques de qualité standard et l’organisation d’opérations de tris réguliers en collaboration avec les producteurs permirent de se constituer une clientèle fidèle pour vendre des marchandises achetées grâce à des contrats dans le monde entier. En 1908, Samuel Pieter van Eeghen prit la tête de la jeune Association pour le commerce du Coprah, qui travaillait dans l’intérêt à la fois des vendeurs et des acheteurs. Le thé, le cacao et les épices se constituèrent de tels consortiums sur le même fondement et modèle. Par contre, les peaux de bêtes, et surtout le tabac, pour lequel les connaissances de l’intermédiaire étaient indispensables, échappaient à cette nouvelle stratégie. Entre 1880 et 1912, les importations effectuées par la maison Van Eeghen & Co atteignirent des sommets, qui s’élevaient à des sommes comprises entre 3,8 et 8,4 millions de florins, mais pendant la 1ère guerre mondiale, les banques néerlandaises s’effondrèrent et les liaisons maritimes furent réduites à leur plus simple expression. Les marchands indonésiens se tournèrent les Etats-Unis et le Japon.
Quand, après la 1ère guerre mondiale, l’économie planétaire se remit des dommages causés par ce conflit international, les expéditions directes de coprah et de latex reprirent. La maison Van Eeghen fit le choix de s’axer sur des segments de marché plus lucratifs. Le commerce du tabac et des peaux de bête continua dans des proportions considérables, tout comme les expéditions de latex, de capok, de thé, de café, de coprah et d’épices.
La grande récession économique du début des années 30 et la vague protectionniste qui l’accompagna eurent un fort retentissement sur les Pays-Bas engagés dans le libre-échange, bien que les activités commerciales de la maison Van Eeghen dans le transport des produits indonésiens résistent au choc remarquablement bien… jusqu’à ce que la 2nde guerre mondiale n’éclate, où là, le commerce avec l’Indonésie s’arrêta brutalement. La société Van Eeghen & Co. se retourna en adoptant la technique du « plongeon de la baleine » et s’attacha à conserver un « personnel en interne composé d’associés », en l’espèce Messrs H.L. et Louis Charles van Eeghen et J.C. de Beaufort, pour continuer de ronronner en attendant…

De l'ère mercantiliste à la période postcoloniale... : 1663 - 1820

Un commerce de marchandises prospère :
En 1662, le marchand drapier Jacob van Eeghen, d’origine flamande, quitta le Sud des Pays–Bas pour s’installer à Amsterdam, qui connaissait alors un plein essor. Il devint très vite un transporteur maritime reconnu sur la place, important et exportant des marchandises pour son propre compte ou sur commande. Le lin et ses graines provenaient de Flandres, d’Angleterre et de Westphalie et étaient acheminés vers les Antilles (pour ce qui était de la variété le plus grossière provenant des Flandres) et vers la France (pour ce qui était des produits de toute première qualité) ou étaient vendus sur place. De France et du Portugal, on faisait venir du vin et d’énormes quantités de sel pour conserver le hareng saur, un secteur en plein expansion. Le sel était également échangé avec des clients de la Mer Baltique contre du bois de construction.
Après 1740, les activités commerciales de la maison Van Eeghen aux Antilles se sont mises à se multiplier, grâce aux denrées de première nécessité importées en provenance de Curaçao comme le tabac, la cacao, les peaux d’animaux et l’indigo, mais plus tard, également le sucre, le café et la quinine, et l’exportation de nombre de produits, principalement de la toile de lin. Par exemple, en 1747 le nouveau navire de la maison Van Eeghen, l’America  devait acheminer vers Curaçao de la toile estimée à 28 725 florins, ce qui représentait plus de deux fois la valeur du vaisseau.
Les importations de grains en provenance de la Baltique, de vin de France, d’huile de Gênes en Italie, de cuivre, d’amandes et de coton du Levant et d’Afrique du Nord se sont poursuivies tout au long du XVIIIe siècle. La plupart des produits de première nécessité étaient raffinés avant d’être réexportés ou exportés en tant que produits semi-finis, de plus en plus vers les Amériques et l’Extrême Orient. Alors que le monopole de la Compagnie néerlandaise des indes Orientales (VOC ou « Vereenigde Oost-Indische Compagnie ») commençait à décliner, le thé, les épices et les tissus indiens prenaient une importance croissante.
En 1763 et 1772, la Bourse d’Amsterdam fut touchée par une grave crise du crédit, qui n’entrava pourtant quasiment pas les activités commerciales de la maison Eeghen. Le lin de Silésie devait devenir la marchandise principalement transportée, acheminée par bateau vers les ports d’ Hambourg ou d’Altona, ou par diligence via Osnabrück. En 1778, les frères Van Eeghen, Christian et Pieter (alors partenaires-associés de la maison Juilion & Rulffs) ont mis leurs forces en commun afin de créer, pour la première fois, la société de manière officielle. Pieter a racheté les parts de ses associés, leur mère, Cornelia, a apporté ses capitaux propres et la société Pieter & Christiaen van Eeghen vit le jour. L’immense réseau de la maison Julion & Rulffs a permis d’élargir considérablement l’éventail de produits, grâce, en l’occurrence, à l’étain, au salpêtre et aux épices. Outre le lin, le commerce du cuir de Russie était florissant ; les grains de Rostock et de Suède prenaient la direction de l’Espagne et de l’Italie ; le sucre, le café et les grands vins revenaient par bateau de Nantes, Bordeaux et Montpellier ; le riz qui provenait généralement d’Italie commença après 1790 à être importé des U.S.A. (Charleston).
Le recul de la France qui amena une pointe d’accent américain :
À partir de 1795, l’emprise de la France sur les Pays-Bas porta un coup dur aux activités de la maison Eeghen dans le commerce des marchandises. Des pavillons neutres devaient empêcher la marine anglaise de s’emparer des bateaux. Dès 1807, les navires marchands américains détenaient 92% du marché. Christiaen van Eeghen et ses amis ont donné un certain sens au mot « caisses de l’État » peu avant que le premier ne décède en 1798.
Jusqu’en 1810, le liège et les bouchons prenaient la direction de New York ; pour la traversée du retour on chargeait du coton, des céréales et de la braie, et ce en quantités de plus en plus importantes, du tabac cultivé à Galveston et Baltimore, du sucre de Cuba et du café des Indes orientales. Pieter van Eeghen et Hendrik Sye, un associé qui était entré dans l’entreprise en 1792, commerçaient en particulier avec l’Amérique, par l’intermédiaire de vieux amis, la maison de commerce LeRoy & Bayard installée à New York. Cependant, en 1810 Napoléon devait finir par étouffer l’économie de l’empire en instaurant le système européen, mettant un coup d’arrêt à ce commerce. En 1812, les avoirs de la maison Van Eeghen ne représentaient plus qu’un quart des sommets qu’ils avaient atteints avant la guerre, mais c’était l’une des rares maisons de commerce qui étaient parvenues à substituer.
Au début de l’année 1812, Pieter devait quitter l’entreprise, pour être remplacé à la barre par Hendrik Sye. Les fils de Christaan, Jan (II), et plus tard Pieter (II), firent leur entrée pour constituer la société Van Eeghen & Co. Le commerce avait repris, quand en 1815 le premier navire américain, l’Emulation, vint jeter les amarres dans le port d’Amsterdam rempli d’une cargaison de coton et de tabac destinée aux Van Eeghen. La cargaison de la traversé dans l’autre sens était composée de cashmere, de tissu, de toile, de fromage, de harengs et d’ « Haarlemmeroil », une espèce d’huile médicinale. Bien que le tabac et les céréales de la Baltique avaient le vent en poupe, le transport de marchandises resta relativement modeste jusqu’à la fin des années 1830.

Notre participation à l’histoire de la marine marchande : 1662 - 1950

Bien que la maison de commerce Van Eeghen était au départ spécialisée dans le transport maritime, elle se tourna rapidement vers d’autres activités, telles que les opérations bancaires relatives aux expéditions de marchandises, mais uniquement quand les conditions économiques s’y prêtaient, afin de dynamiser son cœur de métier.
Après 1672, la maison Van Eeghen s’associa à un nombre sans cesse croissant de coopératives (« partenrederij » en néerlandais) possédant des navires, et dont les membres détenaient chacun une ou plusieurs des 64 parts constituant l’ensemble. Il était plus sûr financièrement de détenir un 1/64ème de parts que de posséder soi-même un bateau, et surtout si ce dernier coulait et était perdu à jamais, ainsi ce système de coopérative était un moyen de s’assurer contre les risques encourus. Au XVIIIe siècle, les frères Van Eeghen étaient à la tête d’un certain nombre de bâtiments de transport, en particulier des voiliers appelés « West Indiamen ». De plus en plus, on ne se vendait des participations dans les navires qu’entre amis proches, mais souvent aussi au capitaine, ce qui permettait de décupler sa motivation. Au fil du temps, l’intérêt pour les navires s’accrût, et dès 1760 Jan van Eeghen devint l’armateur d’un grand nombre d’unités. Au plus haut de la pénurie de crédit, la veuve de Jan, Cornelia, fit construire une frégate de 42 mètres de long par le chantier naval Ary Staets & Compagnie, dont elle était en partie propriétaire. Au début des années 1790, les Van Eeghen retirèrent de façon assez intelligente la plus grande partie des parts qu’ils détenaient dans le transport maritime, dans la mesure où la guerre menaçait de nouveau et que les cinq puissances maritimes hollandaises (« amirautés ») étaient dépourvues de financements.
La NHM ne fut pas avare en moyens pour tenter de remettre à flot la marine marchande et tous les secteurs de l’industrie hollandaise, après le désastre provoqué par la folie napoléonienne. Sur terre, elle encourageait les petites et moyennes entreprises manufacturières, plutôt que les grandes usines mécanisées, dont le corollaire était l’enfer que constituaient les grandes villes surpeuplées, bien que cela ne contribuât en rien à la compétitivité. En mer, le système instauré par la NHM, qui permettait de garantir aux navires hollandais des cargaisons à des tarifs très avantageux, et ses réglementations très strictes quant aux normes de construction et au nombre de membres d’équipage, contribua à doter le pays d’une flotte marchande également fort peu compétitive et pléthorique en termes d’équipage, bien que sure. Lorsque, après 1840, les règles protectionnistes imposées par la NHM se relâchèrent, de grands et rapides clippers américains, à l’équipage réduit, donnèrent du fil à retordre aux « coquilles de noix hollandaises». À partir de 1853, les Hollandais se mirent à construire leurs propres clippers.

L’ Alcyone

Ce qui préoccupait la maison Van Eeghen, c’était que la marine marchande, en vertu des mesures protectionnistes de la NHM, ne mettait à disposition des marchands, quand ceux-ci avaient de la chance, que des petits rafiots désespérément lents, alors que ce dont ils avaient besoin, c’était de grands bâtiments de transport rapides pour permettre de convoyer le plus vite possible les cargaisons et profiter des opportunités offertes par le marché. Il était désormais grand temps de faire revivre le métier d’armateur : en 1856, les trois-mâts barques le Capella, l’Alcyone et le Bellatrix furent construits, suivis en 1856 par le célèbre clipper amerloque, véritable bateau volant, de George Raynes, de 1 498 tonneaux, le Witch of the Waves, rebaptisé l’Electra.
De 1872 à 1874, les architectes de marine Meursing & Huygens du célèbre chantier naval « Concordia » construisirent pour le compte de la maison Van Eeghen les trois-mâts Amsterdam et Amstel, jaugeant respectivement 1 482 et 1 594 tonneaux. De construction composite hollandaise unique en son genre (quille, membrures et coque intérieure en fer, et une coque externe en pitchpin), ils s’avéraient rapides, robustes et permettaient de charger de grandes cargaisons. Les navires des Van Eeghen battaient rarement des records en durée de traversée, mais le temps raisonnable qu’ils mettaient était toujours plus ou moins le même.
Mais l’ouverture du Canal de Suez en 1869 rendit les voiliers très peu pratiques sur la route des Antilles, et la marine marchande se convertit rapidement à la vapeur, ce qui fit augmenter de manière considérable les investissements. Souhaitant conserver son cœur de métier, la maison Van Eeghen revendit l’Electra en 1875, et en 1887, ce fut le tour du dernier vaisseau. La société Van Eeghen & Co. continua néanmoins à jouer un rôle important dans le financement et l’assurance des expéditions maritimes, cette dernière activité étant le passe-temps favori de Christiaan. En 1900, les intérêts générés par les sociétés de fret, et surtout celles au départ d’Amsterdam, représentaient le double de ceux générés par les plantations en Inde et le triple de la valeur des actions dans le secteur du latex. S.P. van Eeghen était un ardent partisan de l’élargissement des écluses d'IJmuiden, qui permettent l’entrée dans le port d’Amsterdam. Après la seconde guerre mondiale, les rentrées d’argent de la maison Eeghen générées par le transport maritime diminuèrent, alors que ses bénéfices tirés du « groupement de cargaisons » augmentaient.

Un pied dans la finance et l’industrie : 1750 - 2012

Nos services fiduciaires :
Amsterdam a été aux XVIIe et XVIIe siècles le berceau des produits d'assurance (« particuliere assurantie ») pour prémunir, comme l’a si bien dit la Lloyd’s, contre l’« événement de mer ». Dans les années 1750, ces périls de la mer dont il est question se sont aggravés en voyant encore des guerres se profiler à l’horizon, et dans la mesure où les Hollandais n’étaient pas directement impliqués, vendre de l’assurance rapportait de l’argent. Jan van Eeghen a été l’un des souscripteurs les plus importants à la Bourse d’Amsterdam.
À compter de 1779, P. et C. van Eeghen se sont développés aux États-Unis naissants et se sont diversifiés dans le commerce des valeurs mobilières et la souscription de prêts. Ils ont joué un rôle prédominant dans la fondation d’un consortium portant le nom de Holland Land Company (voir également un grand nombre d’informations intéressantes à consulter sur Google), en devenant les pionniers de la spéculation immobilière aux États-Unis, et enfin, en suscitant l’acquisition d’environ 1, 5 million d’hectares dans les états de New York et de Pennsylvanie.

Le Bureau de la Holland Land Company, qui fait office aujourd’hui de musée, et une carte montrant les terrains dont elle a fait l’acquisition en Pennsylvanie.

Ils investirent sur les terrains achetés en en dressant le cadastre, en construisant des routes et en creusant des canaux d’irrigations, afin de les rendre plus attrayants aux yeux des nouveaux arrivants. Le rythme d’achat des terrains ne put être maintenu et il apparut qu’une grande partie des terrains ne pouvait être vendue que petit-à-petit aux nouveaux arrivants, dont la plupart venaient d’Europe. C’est en 1863 que fut revendu le dernier lopin de terre. En même temps, à la fin du XVIIIe siècle, les services fiduciaires prirent une importance croissante dans le chiffre d’affaires de la maison Van Eeghen, et pendant la majeure partie du XIXe siècle, le commerce a même été éclipsé par les activités bancaires.

Pendant l’occupation des Pays-Bas et d’une grande partie de l’Europe par les Français, beaucoup de riches devinrent sans le sou à la suite du massacre économique perpétré par la France. La société Van Eeghen a contracté un crédit lombard à son nom propre. Après 1812, les Pays-Bas refirent surface en devenant un Royaume indépendant. D’énormes sommes d’argent sommeillaient. Cependant, dans la mesure où le commerce des produits de base ne voulait pas reprendre au-delà du domaine où la Société de commerce néerlandaise (la « Nederlandsche Handel-Maatschappij » en néerlandais) exerçait son monopole, la société Van Eeghen & Co fit bon usage de l’argent en participant à des transactions financières aux Pays-Bas, en Angleterre et en France, en prêtant de l’argent et des fonds.
C’est surtout le commerce des valeurs mobilières qui a contribué à la survie de la maison Van Eeghen, pendant la période de vaches maigres pour le commerce des produits de base. Les dépôts importants des familles ne représentaient que de 50% à 60% des avoirs investis dans les titres mobiliers et firent que la maison était devenue plus un fonds commun de placement qu’une maison de commerce. Jan van Eeghen pénétra davantage encore sur le terrain bancaire en 1829 en devant l’un des directeurs de la Banque centrale des Pays-Bas (la « De Nederlandsche Bank »).
Le domaine des assurances reprit peu à peu un niveau d’activités normal après 1825. À partir de 1850, cette reprise s’accéléra avec le retour sur le devant de la scène du négoce des matières premières et du secteur maritime, grâce à l’instauration progressive du libre-échange avec les Indes Orientales, qui permit à la maison Van Eeghen d’entrer en concurrence avec la Société de commerce néerlandaise, qui avait jusqu’ alors les pleins pouvoirs.
Dans le même temps, l’éventail de produits bancaires s’étoffa également, bon nombre de transactions étant réalisées pour le compte de la Caisse d’Epargne de Semarang et d’un certain nombre d’autres établissements bancaires. Des crédits étaient accordés et des fonds de roulement prêtés à de grandes sociétés sur le territoire national, mais aussi à l’étranger. Environ 2 millions de florins étaient consacrés chaque année pour intégrer des consortiums, ce qui faisait à cette époque de la maison Van Eeghen l’une des principales banques d’Amsterdam.
Le capital considérable accumulé par la société, les 60 fonds qu’elle gérait et le négoce actif par ses associés d’actions d’entreprises amies contribuèrent à étendre peu-à-peu le réseau de la maison Van Eeghen & Co. En 1910, les associés étaient devenus membres du conseil d’administration de plus de 30 sociétés par actions. En mai 1914, Van Eeghen & Co. reçut le droit d’exercer en qualité de société de courtage à la Bourse d’ Amsterdam, et c’est à partir de ce moment- là que l’entreprise s’est appelée officiellement maison de commerce et établissement bancaire. Le négoce des actions était également autorisé sur les marchés de New York, Londres et Paris.
En 1923 et 1924, le prélèvement de crédit était très répandu sur le marché des actions d’Amsterdam, aux fins d’atténuer les effets négatifs des fluctuations spéculatives des taux de change sur le commerce, ce qui ramena pour un temps la capitale hollandaise à son rôle de place financière, qu’elle jouait au XVIIIe siècle. La filiale bancaire de Van Eeghen & Co. était florissante et le restera, sauf pendant toute la durée de la seconde guerre mondiale, où rien n’était florissant du tout. Cependant, lorsque le législateur hollandais introduisit une nouvelle loi interdisant à une même entreprise d’exercer à la fois des activités commerciales et bancaires, la maison Van Eeghen revendit sa filiale bancaire, qui existe encore aujourd’hui sous le nom d’Oyens & Van Eeghen, banque privée de placement, mais qui n’entretient plus aucun lien avec le groupe Van Eeghen.

Notre contribution à l’industrie

En 1837, Jan van Eeghen prit part à l’installation d’une usine de papier, la première entreprise industrielle dans les annales de la maison Van Eeghen. La société Van Eeghen & Co a également contribué de façon encore plus marquante à l’industrialisation des Pays-Bas et à en faire un pays moderne, elle qui fonctionnait encore avec des chevaux de trait et la force du vent pour faire tourner ses moulins, en investissant des sommes considérables d’argent dans la mise au point du métier à tisser à vapeur « Nijverdal » de G. et H. Salomonson. Ils furent parmi les premiers à exporter sans avoir recours à la Banque centrale des Pays-Bas, et en 1953 les premiers à utiliser la vapeur pour le tissage. Van Eeghen & Co., qui avait une velléité de reprendre le commerce du textile, fournit une grande part des capitaux aux Salomonson, qui à leur tour apportèrent à la maison Van Eeghen bon nombre de clients pour l’exportation.
En 1965 fut fondée l’importante société sucrière de Kilombero, en Afrique de l’Est, qui encore aujourd’hui produit du sucre.
Enfin, en 1998, la maison Van Eeghen a ouvert à Montréal une usine d’épices, de fines herbes destinées à faire la cuisine et de légumes déshydratés, afin de trier, nettoyer, mélanger et conditionner tous ces produits salés pour le marché en gros nord-américain du secteur agro-alimentaire.
Toutes ces activités ont pour point commun qu’elles ne durent relativement pas longtemps et qu’elles seront à terme revendues.

Notre rôle social au sein de l’entreprise

Comme chez tous les marchands du XVIIe siècle, les premiers Van Eeghen avaient leur bureau au rez-de-chaussée, entreposaient leurs marchandises au grenier et au sous-sol, et vivaient à l’étage restant, ce qui explique l’architecture de nombre de grandes bâtisses qui longent les canaux à Amsterdam. Il n’y avait pratiquement pas de séparation entre la vie privée et le monde des affaires. Dans ces familles de marchands à l’esprit assez libéral, le personnel finissait plus ou moins par faire partie de la famille au sens large du terme.
Eu égard à la méritocratie qui prévalait dans la société hollandaise du XVIIe siècle, il était assez courant que les femmes participent à la vie économique. L’habitude qui paraissait répandue d’épouser une femme qui avait un certain sens des affaires s’avérait utile quand il fallait assurer la succession d’un Van Eeghen qui mourait avant l’heure. La veuve de Christiaen van Eeghen, Suzanne Blok, fut à la tête de l’entreprise pendant un demi-siècle, dans la mesure où ses fils et son petit-fils sont également morts très jeunes. En 1760, Jan van Eeghen mourut prématurément, à l’âge de 31 ans, tout en ayant accompli ce que d’autres n’auraient pas pu faire avec le double du temps. Sa veuve, Cornelia de Clerq, prit la relève et tout en élevant quatre enfants, continua les activités commerciales et le transport maritime, grâce à l’aide d’un réseau d’amis sur lesquels elle pouvait compter dans le monde entier. La sobriété et la constance érigées en valeurs par la famille Van Eeghen pour la conduite de leurs affaires ont démontré leur vertu. Le réseau d’amis sur lesquels elle pouvait s’appuyer lui a apporté toute la compassion dont elle avait besoin. L’activité se relâcha un peu, mais la jeune mère doublée de la femme d’affaires a su sortir l’entreprise sans encombre des deux crises catastrophiques pour le crédit qu’a connues la Bourse d’ Amsterdam en 1763, puis en 1772-73.
Au début des années 1850, la maison Van Eeghen fut un modèle d’armateur responsable aux yeux de la société, en veillant au bien-être de ses équipages grâce à la conception novatrice de ses nouveaux trois-mâts, le Capella, l’Alcyone et le Bellatrix. Ces navires étaient sans doute les premiers à disposer de cabines pour accueillir leur équipage sur les ponts, lesquelles pouvaient être aérées à la convenance et être maintenues au sec, plutôt que les cales sombres et humides qu’ils avaient connues auparavant.
La nouvelle conception du commerce qui est apparue à la fin des années 1890, et qui tirait le meilleur parti de l’amélioration des moyens de communication entraîna avec elle une surcharge de travail, ce qui conduisit à faire entrer parmi le personnel de Van Eeghen & Co, à cette époque totalement masculin, la première femme employée pour taper à la machine. Ce contingent complémentaire atténua les relations de travail patriarcales, bien que très détendues, mais il fallait encore s’attacher à sérieusement réformer la gestion du personnel. Un bon salaire et le même nombre de jours de congés pour tous, de l’humble servante à l’associé hautain, et ce même en 1900. Quand il s’agissait de fêter quelque chose, que ce soit d’ordre privé ou lié aux affaires de l’entreprise, tout le monde était invité. Pour Noël, quand Mr. S.P., comme on l’appelait, était allé à la chasse, tout le monde avait son lièvre pour le réveillon. Il se peut que les temps changent, mais les habitudes restent les mêmes.
Au début des années 1960, une association caritative a été créée grâce à des dons et des legs familiaux très importants, et en tant que telle avait acquis le statut d’actionnaire majoritaire avec son propre conseil d’administration indépendant. Bien qu’en 2014 des changements de gouvernance significatifs soient intervenus, cette fondation demeure le seul actionnaire majoritaire avec les mêmes motivations caritatives qu’auparavant. Outre cette motivation louable, cela permet également d’éviter les éventuels litiges assez complexes de succession, auxquels les entreprises familiales ont souvent à faire face.